Les défis sociaux et sanitaires auxquels les individus et systèmes de soins sont confrontés nécessite des pratiques interdisciplinaires dans lesquelles les professonnels de santé, les psychothérapeutes et des coachs de santé collaborent pour soutenir les changements de comportements de santé.
Lorsqu’on évoque la profession nouvelle des coachs de santé, la question la plus courante concerne la ou les différences clés pouvant exister avec le métier des psychothérapeutes. Ces deux professions répondent à des demandes concernant la santé mentale et physique, en s’appuyant sur un ensemble de théories et d’outils communs concernant le changement humain. Cette question si souvent posée témoigne que dans l’esprit du grand public, les similitudes apparaissent bien plus évidentes que les différences. S’il est vrai que les aires de chevauchements sont nombreuses, il existe cependant des différences importantes entre les deux pratiques. De nombreux psychothérapeutes ajoutent des compétences de coachs à leurs pratiques. Et de nombreux coachs professionnels tentent de mieux circonscrire leurs champs d’activité en se formant aux bases de la psychopathologie, afin de savoir à quel moment adresser leurs clients à un psychothérapeute. Les deux professions sont amenées à travailler avec des patients souffrant de maladies chroniques complexes très liées au stress. En tant que profession nouvelle, le coaching de santé peut sembler empiéter sur le territoire de la psychothérapie, une profession plus ancienne. Le coaching de santé a besoin de faire connaître les spécificités de son champ d’intervention et aussi d’organiser sa profession, tant au niveau des compétences exigées que des conditions d’exercice. Cet article a pour but de présenter les points de similitudes et de différences entre le coaching de santé et la psychothérapie, en m’appuyant sur le travail de fond réalisé par Meg Jordan et John B. Livingstone (1), mon expérience personnelle du coaching de santé. La clarification des frontières entre ces deux professions permet de montrer qu’elles sont naturellement appelées à coopérer pour le plus grand bénéfice de leurs clients.
Les rôles des coachs et des psychothérapeutes
La santé n’est pas que l’absence de maladie ou de souffrance, mais c’est « la capacité d’un individu à s’adapter et se prendre en charge face à des problèmes physiques, psychologiques et socio-culturels. » Cette définition récente de la santé (2) souligne la complexité des compétences dont un individu peut avoir besoin pour se maintenir en santé. Il a besoin des professions médicales pour résoudre les souffrances physiques, il a également besoin de psychothérapeutes (ou psychologues cliniciens) pour soulager les souffrances d’ordre psychologiques, et enfin il a besoin d’une aide pour apprendre à faire preuve de résilience face aux difficultés de la vie, à se prendre en charge pour contribuer lui-même à sa santé, et enfin trouver sa place et son équilibre dans son environnement social et culturel. Ces dernières fonctions justifient la place du coach de santé. Aucune profession à elle seule peut prétendre posséder l’ensemble des connaissances et des compétences permettant de répondre à un tel cahier des charges en matière de santé mentale et physique. C’est la raison pour laquelle toutes ces professions doivent coopérer sur la base d’une complémentarité de rôles et de compétences.
Les rôles et fonctions des coachs de santé et de bien-être
La profession de coach de santé et de bien-être est récente, car elle a vu le jour au cours des 10 à 15 dernières années et surtout aux USA. Cette profession émergente manque encore de consensus en ce qui concerne ses compétences clés, le contenu de la formation…etc. Aux états Unis le Consortium national pour l’accréditation des coachs en santé et bien-être (NCCHWC), créé en 2009 tente de donner un cadre national à cette profession. Si les coachs de santé s’adressent avant tout à des personnes souffrant de maladies chroniques dont les améliorations dépendent surtout d’important changements d’habitudes de vie, les coachs de bien être s’adressent à des personnes qui n’ont pas de maladies mais qui veulent avoir plus de satisfactions et de bien-être dans leur vie.
Le coaching de santé est une réponse aux nouvelles contraintes socio-économiques du monde de la santé. Les systèmes de soin ont de plus de mal à prendre en charge médicalement et financièrement des maladies chroniques qui sont la conséquence directe de styles de vie pathologiques et qui peuvent être prévenues par des habitudes de vie plus saines. Les patients se sentent souvent instrumentalisés par une médecine moderne qui semble plus s’intéresser à l’organe malade qu’à la personne dans sa globalité. Et les professionnels de santé sont malmenés par l’exercice d’une médecine technique qui par ses contraintes de performances et de rentabilité, peut se déshumaniser et oublier le pouvoir thérapeutique de la relation. Le coaching de santé constitue l’une des réponses à ces profonds changements du paysage de la santé.
Le coach de santé ne fait pas de diagnostic, ni ne soigne, mais il aide ses clients à mettre en œuvre les recommandations médicales en matière d’hygiène de vie. Il motive ses clients pour qu’ils adoptent des comportements plus sains, pouvant impacter l’évolution de maladies chroniques, cardiovasculaires, métaboliques (diabète), rhumatismales et cancéreuse.
Les coachs de santé viennent d’horizons professionnels assez divers. Certains sont déjà des professionnels de santé (infirmières, psychologues, kinésithérapeutes, médecins, nutritionnistes…etc.), alors que d’autres ont des parcours divers (éducation de la santé, éducation, coachs physiques, coachs d’entreprises, sophrologues, naturopathes, DRH, spécialistes du bien-être)
Les méthodologies du coaching de santé sont celle du coaching, mais adaptées au contexte de la santé. Il ne s’agit plus de l’amélioration d’une performance professionnelle, mais de buts de santé dont les enjeux sont parfois majeurs, dont la réalisation va grandement questionner les éléments de la « structure profonde de l’expérience », à savoir les valeurs de la personne, sa vocation, ses buts de vie, ainsi que les obstacles internes et souvent inconscients (problématiques émotionnelles) qui pourraient y faire obstacle. La résolution des difficultés psychologiques anciennes liées à santé physique implique parfois de grands bouleversements dans la vie des individus. Dans son « Voyage du héros », la personne est invitée à répondre à un appel, à se confronter à ses limites, à développer de nouvelles ressources, rechercher des soutiens, et donner à son nouveau concept de soi et à sa vie une expression plus riche de sens. Aux méthodologies habituelles du coaching s’ajoutent des outils et modèles plus spécifiques à une approche globale et systémique de la santé (théorie des systèmes, sémantique générale, TCC, Entretien motivationnel, neurosciences, approches énergétiques ou neuro linguistiques.) Ces modèles et outils permettent de comprendre et modifier la complexité des représentations mentales, facilitantes ou limitantes, qui interfèrent avec buts de santé et de vie.
Les rôles et fonctions des psychothérapeutes
Ces derniers sont formés à établir le diagnostic et le traitement des souffrances en rapports avec les troubles mentaux décrits dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux V (DSM-V. Si les psychothérapeutes sont amenés à travailler sur des personnes souffrant à la fois de maladies mentales et physiques, des états postopératoires, des rééducations après une blessure ou un traumatisme, et aussi des problèmes plus généraux de prise en charge de la santé, leur intervention cherche avant tout à alléger voire guérir une souffrance psychologique.
Les méthodologies de la psychothérapie sont souvent bien plus larges que celles du coaching de santé, car le psychothérapeute est formé à l’évaluation et au diagnostic de très nombreuses situations pathologiques. Par exemple, les abus sexuels, les comportements de violence, les troubles alimentaires graves, les addictions, les troubles de la personnalité, les dépressions et troubles anxieux graves. Le psychothérapeute est censé posséder des connaissances théoriques et pratiques plus approfondies des systèmes de croyance et d’affects que celles du coaching de santé.
Les représentations du public vis-à-vis des deux professions
Les clients et prospects ont besoin de savoir facilement quand s’adresser un psychothérapeute ou quand s’adresser à un coach de santé. Le premier sera plus facilement sollicité en présence d’une souffrance psychologique à diagnostiquer et à soulager voire réparer. Le second sera sollicité quand les professionnels de santé recommandent l’adoption de nouveaux comportements de santé, qui par leurs répétitions se transformeront en habitudes de santé et impacteront profondément la santé et la vie de la personne.
Dans l’esprit du public le coach de santé n’est pas un spécialiste de santé mentale, comme l’est un psychiatre, un psychologue clinicien, un psychothérapeute. Des personnes pourront préférer s’adresser en premier à un coach de santé, plutôt qu’un psychothérapeute, par crainte d’une approche pathologisante de leur situation par un spécialiste des maladies mentales, et aussi du fait d’un faible niveau d’inconfort et de souffrance. Le coach de santé devra donc être très vigilant sur les situations qui relèvent de ses compétences et celles qui sont du ressort du psychothérapeute. Ce qui signifie que tout coach doit posséder quelques repères en psychopathologie pour définir les frontières de son champ d’intervention et de celles des spécialistes en santé mentale. Le coach de santé se doit de refuser de prendre en charge des personnes en souffrance, puisque son travail n’est pas de réparer mais d’accompagner son client dans la mise en place de nouveaux comportements de santé et le dépassement des obstacles qui pourraient interférer avec la réalisation des buts de santé et de vie.
L’impact du problème de santé mentale sur la vie de la personne devrait pouvoir servir de critère pour orienter une personne vers un psychothérapeute ou un coach de santé. Dès que le problème de santé représente un obstacle important au fonctionnement quotidien de la personne, celle-ci doit être adressée à un psychothérapeute. Bien souvent le niveau d’inconfort émotionnel des obstacles qui peuvent émerger dans le coaching de santé ne nécessite pas l’intervention d’un psychothérapeute. Dans l’idéal, c’est au professionnel de santé de faire ces distinctions avec le plus de justesse possible et s’adresser le sujet au coach de santé ou au psychothérapeute.
Les similitudes entre coaching de vie et psychothérapie
Les deux professions partagent des outils et modèles de changement, des règles déontologiques, et une vive conscience de l’importance de la relation avec le client. Cette relation permet de créer un cadre de sécurité et de protection indispensable au changement, de soutenir les efforts du client. Dans certains cas la profondeur de la relation devient le véhicule même du changement.
Des méthodologies communes
Le coaching de santé et la psychothérapie s’appuient sur les mêmes cadres et modèles théoriques, notamment les théories de l’autodétermination, du développement de l’adulte, de l’apprentissage, l’entretien motivationnel, le modèle trans-théorique, les approches systémiques, les travaux sur le locus de contrôle, la théorie de l’auto-efficacité, l’enquête appréciative, les techniques de communication non violentes, les TCC, l’hypnose, l’Analyse transactionnelle et la programmation neuro-linguistique.
La formation des coachs de santé puisera également ses modèles pratiques et opérationnels de changements comportementaux, dans les domaines du développement personnel, par exemple la connaissance et le dépassement de soi issus de la psychologie positive, les approches du leadership de soi, et aussi des découvertes récentes en neurosciences.
La formation des psychothérapeutes s’appuiera sur une formation théorique plus poussée et l’apprentissage de différents modèles thérapeutiques en fonction des écoles. Par exemple la psychodynamique ou la psychanalyse, la thérapie centrée sur les solutions, les approches transpersonnelles, la Gestalt, la thérapie basée sur la pleine conscience…etc.
A l’évidence, ce ne sont donc pas les outils et modèles théoriques et pratiques utilisés par les coachs de santé et les psychothérapeutes qui permettront de faire une distinction claire entre ces deux professions. Rappelons que de nombreux outils et modèles utilisés par les coachs sont issus de la psychothérapie et adaptés aux exigences de performances du monde de travail et des organisations.
Les règles déontologiques
Les deux professions interviennent dans le cadre de règles et normes déontologiques de leurs professions respectives. Ces règles sont cependant bien plus présentes dans des professions réglementées telles que la psychiatrie, la psychothérapie, la psychologie clinique… qu’elles ne le sont dans le coaching de santé. La formation des professionnels de santé mentale est très codifiée en termes de compétences et durées, alors que celle des coachs de santé ne l’est pas encore. Mais rappelons que le coaching de santé est une profession émergente qui s’organise et se structure dans de nombreux pays, et tout particulièrement aux USA.
La qualité de la relation
Les deux professions accordent une grande importance à la qualité de la relation entre le patient et le praticien. Tous deux s’efforcent d’établir une relation fondée sur l’empathie, la confiance et l’écoute profonde, pour créer un cadre de protection et de sécurité et aussi pour soutenir les efforts de changement du client. Dans certaines psychothérapies comme dans des approches génératives (Coaching génératif, Transe générative de Robert Dilts et Stephen Gilligan), la qualité et la profondeur de la relation entre client et praticien devient le véhicule même de changement et de transformation. Il faut une personnalité saine et une bonne expérience pour ne pas tomber dans les mécanismes de transfert (quand le client fait du thérapeute l’objet de ses problèmes), de contre-transfert (quand le thérapeute s’implication trop émotionnelle dans la relation thérapeutique) ou des projections des clients (quand les clients projettent leurs propres idées, motivations ou un sentiment sur les autres sans le reconnaître). Quand ils peuvent être reconnus, ces mécanismes courants de défense psychologique sont pour les psychothérapeutes des occasions de progresser. S’ils sont ignorés, ces mécanismes peuvent être potentiellement destructeurs pour la relation thérapeutique.
Les thérapeutes sont beaucoup plus formés que les coachs de santé aux thèmes du transfert, du contre-transfert ou de la projection. Si les coachs professionnels n’ont pas besoin d’une formation complète en psychopathologie, rappelons qu’ils doivent cependant être formés à repérer les situations dans lesquelles la relation de coaching ne fonctionne plus et qu’une psychothérapie s’impose.
Si les coachs de santé sont formés à créer un cadre relationnel de confiance facilitant la réalisation des objectifs de santé et le dépassement d’éventuels obstacles, ils ne sont pas toujours préparés à faire face à des clients qui vivent des situations de désespoir, d’auto-sabotage ou l’auto-dévalorisation sévère. Les compétences permettant d’aider les clients à autoréguler leurs émotions sont plus du domaine de la thérapie que du coaching de santé. Des années d’expériences permettent aux psychothérapeutes de reconnaître et de gérer leurs propres émotions dans l’espace intersubjectif de la thérapie.
L’efficacité bien démontrée des deux pratiques
L’efficacité du coaching de santé
Malgré la très grande hétérogénéité des méthodologies utilisées dans les travaux de recherches sur l’efficacité du coaching de santé sur une large variété de situations médicales, les résultats de ces études confirment cette efficacité. Selon une étude récente (2), « le coaching « entraîne des améliorations cliniquement pertinentes de plusieurs facteurs de risque liés à des biomarqueurs (notamment la pression artérielle systolique et diastolique, le cholestérol total, le cholestérol LDL, le cholestérol HDL, les triglycérides, la glycémie à jeun, le poids corporel, l’indice de masse corporelle, le tour de taille et la condition cardiorespiratoire) dans diverses populations ». Le coaching a également contribué à améliorer la qualité de vie liée à la santé et à réduire les admissions à l’hôpital chez les patients atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO).
L’efficacité des psychothérapies
Nous disposons actuellement de plusieurs milliers d’études consacrées à la question de l’efficacité des psychothérapies. Lambert et al. (3) ont repris les différentes méta-analyses publiées sur le sujet de l’efficacité des psychothérapies. Ce travail confirme que 70 % des patients profitent clairement de la psychothérapie, 30 % des patients profitent de prises en charge non spécifiques, et 15 % s’améliorent spontanément. Il convient d’admettre que les psychothérapies sont des traitements efficaces. Les bénéfices de la psychothérapie égalent ou surpassent parfois ceux de certains médicaments antidépresseurs dans les cas de dépressions légères ou modérées. Pour les dépressions sévères, les médicaments montrent une légère supériorité, et les traitements combinés se montrent les plus efficaces
Différences générales et spécifiques entre coaching de santé et psychothérapie
Le psychanalyste Michael Bader (3) considère que les distinctions habituellement utilisées entre coaching et psychothérapie sont des mythes simplistes et irréalistes. Par exemple les thérapeutes travaillent avec le passé, le pourquoi et l’esprit inconscient alors que les coachs travaillent avec le présent, le comment faire et l’esprit conscient. Michael Bader souligne que ces affirmations vont paraître absurdes aux thérapeutes formés à la thérapie brève orientée solution.
Les différences générales
Compte tenu des remarques ci-dessus, il convient donc d’aller chercher des distinctions dans d’autres aspects de ces deux professions. Les différences générales se rapportent aux durées de formation et aux attentes des clients.
Les différences en matière de formation.
Pour la formation des psychothérapeutes en France il faut compter entre 4 à 7 ans d´études à raison de 20 à 40 jours d´enseignement par an. Le titre de psychologue clinicien est délivré à tout diplômé d’un Master 2, soit 5 années d’études. La formation de psychopraticien n’étant pas règlementée, les durées de formation sont très variables. Ces données chiffrées peuvent varier d’un pays à l’autre.
La durée de formation des coachs de santé est extrêmement variable, allant de 24 heures pour une initiation en ligne, à des programmes hybrides de 6 mois à 2 à 3 ans d’études de niveau universitaire. Rappelons qu’il n’existe pas encore de normes consensuelles pour cette profession émergente. Il semble important de considérer le coaching de santé comme une spécialisation du coaching professionnel. Ce qui signifie qu’un coach de santé a déjà intégré les compétences d’un coach professionnel, telles qu’elles sont définies par les principales associations professionnelles de coach (EMCC, ICF, SF coach…etc.), ce qui nécessite des formations qui durent en moyenne un à deux ans à raison de quelques jours par mois. Il est intéressant de noter que les recherches réalisées sur les compétences des coachs de santé concluent sur le fait que ces compétences sont bien plus en rapport avec coaching qu’avec la clinique. Le site web Coaching-Santé.net propose une formation de coaching de santé aux professionnels de l’accompagnement (professions médicales et paramédicales, psychologues, psychothérapeutes, coachs professionnelles). Cette formation de 15 jours en présentiel comporte à peu près autant de journées de travail personnel ou en sous-groupe.
Les attentes des clients
Ceux qui contactent un psychothérapeute vont le faire, souvent après une période d’interrogations sur le fait d’avoir ou non une maladie mentale, jusqu’au jour où le niveau de souffrance et les comportements dysfonctionnels deviendront un handicap à la poursuite de leur vie quotidienne. Les clients attendent un soulagement de leur souffrance et la possibilité de reprendre leurs activités quotidiennes. Ils rechercheront une relation de confiance et de sécurité leur permettant d’évoquer leurs comportements dysfonctionnels, d’exprimer leur souffrance, et explorer les facteurs causals intrapsychiques et interpersonnels.
Ceux qui contactent un coach de santé vont le faire sur une recommandation médicale ou après avoir pris conscience du danger qu’il y a à poursuivre des comportements malsains. Ils cherchent une aide pour atteindre des objectifs liés aux habitudes de santé, au bien-être, à l’exercice, au poids, à la nutrition, à la gestion du stress, à la peur de vieillir, ou à la santé en générale. Les coachs de santé étant souvent assimilés à des éducateurs de santé, les clients peuvent bien plus s’attendre à recevoir des conseils de santé, qu’à exprimer clairement leurs différentes attentes ou à prendre une part aussi active et responsabilisante dans la réalisation de leur but de santé. Il n’est pas toujours facile de se défaire du modèle médical de prise en charge du patient à une prise en charge de soi.
Le coach de santé ne fait pas de diagnostic médical, ne prescrit pas de traitement. Son attention première ne porte pas sur les causes des dysfonctionnements, mais sur les buts de santé, les ressources à mobiliser pour les réaliser et les obstacles à dépasser dans le présent. Les dynamiques intrapsychiques et interpersonnelles sur les causes des obstacles et des émotions négatives sont notées et accueillis avec empathie mais ne sont pas explorées en profondeur comme pourrait le faire un psychothérapeute.
Quand ces problèmes émotionnels sous-jacent apparaissent, par exemple un traumatisme ou une relation abusive non traitée, et peuvent faire obstacle à la réalisation des buts de santé, le coach de santé devra adresser son client à un psychothérapeute.
Les différences spécifiques entre coaching de santé et psychothérapie
Les distinctions plus spécifiques se rapportent à la façon de situer les ressources, aux niveaux de stabilité ou d’instabilité du client, à l’organisation des séances de travail (résultat recherché, structure des séances et durée de l’accompagnement) et la formation continue des deux professions.
La localisation des ressources nécessaires au changement
Les psychothérapeutes comme les coachs de santé facilitent la mise en place de stratégies de changement chez leur client. Une différence essentielle entre coaching de santé et psychothérapie réside dans la manière de considérer la source des ressources nécessaires à la mise en place des stratégies de changement
Les psychothérapeutes comme les éducateurs thérapeutiques sont formés à être des experts des problèmes mentaux et donc formés à donner des conseils au client ou à prescrire des interventions sur le moment, surtout dans des situations de souffrances aigues impliquant une réponse rapide. La rapidité d’une intervention externe est justifiée, par exemple dans des situations de traumatismes, d’abus sexuels, de troubles de la personnalité et le déficit d’attention. Les psychothérapeutes se doivent de diriger le cours de la thérapie en planifiant le traitement et la gestion des situations qui émergent au cours du traitement.
Les coachs de santé sont formés à considérés leurs clients comme des experts de leur vie intrapsychique. Seuls les clients peuvent décider de changer leurs habitudes de vie, de définir un but de santé, de sortir de leur zone de confort pour se confronter à leurs limitations internes, et à appliquer une stratégie ou un rituel de changement. Le coach de santé ne donne pas de conseils mais facilite les processus de découverte de soi et d’auto-apprentissage de son client. Avec le coaching de santé, les ressources sont chez le client, une démarche qui semble appropriée aux problèmes de santé chroniques et non aigues. Les coachs de santé pourront être frustré de ne pas avoir à donner de conseils, alors qu’ils possèdent de nombreuses connaissances en matière de santé, d’exercices physiques, de nutrition, de gestion du stress, de soins de santé intégratifs…etc. Le simple fait de donner ou de partager des informations fait passer le coach de santé dans un rôle de consultant. Les deux rôles sont possibles si le client en fait la demande. Le coach de santé est un expert des processus de changement et d’autoréparation. Son client est un expert des réponses très personnelles à apporter sur le contenu des processus. Les coachs de santé qui sont aussi des professionnels de santé (médecins, infirmières…) devront faire des changements de postures pas toujours simples à réaliser entre celle coaching et du conseil.
Le niveau de stabilité ou d’instabilité du client
Le thérapeute peut être amené à travailler avec des personnes dont le niveau d’instabilité psychique et comportemental est si élevé qu’il sabote la capacité de la personne à fonctionner de façon efficace. Dans ces situations d’urgence, la priorité du thérapeute est de sécuriser et réconforter son client.
Le coach de santé s’adresse à des personnes émotionnellement stables. Dans le cadre d’une relation de confiance bien établie, le coach de santé peut s’autoriser à utiliser la provocation pour aider son client à sortir de sa zone de confort mentale, émotionnelle et comportementale, afin de faciliter de nouvelles compréhensions de sa situation.
L’organisation des séances de travail et la durée de l’accompagnement
L’organisation du travail des coachs de santé ou des psychothérapeutes est dicté avant tout par la nature de la demande du client.
En psychothérapie, la demande du client concerne le soulagement ou la disparition d’une souffrance. Le psychothérapeute cherchera à dénouer la dynamique interne à la source du blocage et de la souffrance… Pour arriver à une prise de conscience des causes de la souffrance, le psychothérapeute aura probablement besoin de plus de temps de réflexion et de « digestion » des informations délivrées par le client. De ce fait, le déroulement d’une séance et le nombre de séances peuvent sembler moins structurés que dans un coaching de santé.
Le coaching de santé est perçu comme une approche assez structurée, qui suit les lignes directrices des associations professionnelles de coaching. Par exemple, établir un contrat et un objectif ; co- créer la relation, communiquer en écoutant activement et en posant des questions puissantes ; faciliter l’apprentissage et l’atteinte des résultats en surmontant les obstacles. Le processus de coaching de santé, comme tout coaching est organisé autour de la détermination d’objectifs et l’obtention de résultats, en s’appuyant sur des stratégies d’action de type SMART (ou conditions de bonne formulation d’un objectif.) cadrée dans le temps.
Les thérapies dites brèves (Hypnose ericksonnienne, PNL, EMDR, TCC, thérapies corporelles) viennent quelque peu casser ce clivage habituel entre coaching et thérapie. Même brève la thérapie vise à atténuer, voire à faire disparaître des symptômes sur une durée relativement courte, en s’appuyant plus sur les ressources des clients que sur la recherche des causes de la souffrance.
La formation continue
Les psychothérapeutes, comme les professionnels de santé, ont une obligation de formation tout au long de l’exercice de leur profession. Le coaching de santé n’étant pas encore une profession réglementée aux USA comme en Europe, les coachs en santé n’ont pas à ce jour d’obligation de poursuivre leur formation, bien que leur éthique professionnelle justifie un apprentissage continu. Les coachs de santé, sont avant tout des coachs, ou des professionnels de santé qui adhèrent à la déontologie de leurs professions respectives dans laquelle se trouve une obligation de formation continue. Le code de déontologie de l’Association Française des Coachs de Santé (en cours de création) implique une obligation de formation continue.
Une collaboration souhaitable entre coachs de santé et psychothérapeutes
Dans une perspective globale de la santé, une collaboration entre les professionnels du soin, les psychothérapeutes et les coachs de santé apparaît utile et nécessaire.
Une collaboration sur la base de complémentarités d’interventions
Collaborer signifie mettre des différences individuelles au service d’un but commun. A ce jour les différences sont bien mieux établies pour les professions médicales, la psychothérapie que pour le coaching de santé. Celle-ci a encore cruellement besoin définir la spécificité de ses activités et de son champ d’intervention, ses modalités de collaboration avec les autres professions, et de faire reconnaître les standards professionnels de sa profession. Le coach de santé doit par exemple s’assurer que son client est bien pris en charge médicalement, savoir quand et comment demander au client d’informer son médecin du coaching de santé en cours, et quand et comment contacter un médecin ou un psychothérapeute à la demande du client.
Le respect de la vie privée
S’il apparaît souhaitable que les clients puissent consulter à la fois un psychothérapeute et un coach de santé, les règles de confidentialité et de respect de la vie privée du client seront maintenues. Un coach de santé qui travaille seul et sans liens avec un établissement de soins de santé, ne devra pas oublier ces règles de confidentialité, et d’autant plus qu’il ne dispose pas encore de normes propres à sa profession et que son métier n’est pas encore réglementé
Les thèmes non appropriés au coaching de santé
Meg Jordan et ses collaborateurs invitent les coachs de santé à travailler avec un réseau de prestataires de soins de santé (médecins, infirmières, psychologues, psychothérapeutes) et à être très clair sur les situations dans lesquelles ils inviteront leurs clients à s’adresser un médecin ou à un psychothérapeute. Les auteurs ont établi une liste de problèmes psychologiques, ou d’exemples de plaintes des clients qui ne sont pas appropriés au coaching de santé et qui relèvent des interventions des professionnels de santé (médecins ou psychothérapeutes)
Comportement hostile ; intimidation Colère excessive. Comportement imprudent et impulsif. Actions irrationnelles, répétitives, compulsives ou obsessionnelles. Plaintes de manque aigu de sommeil et de troubles somatiques. Deuil douloureux non résolu et prolongé (varie selon le type de perte et les individus) Absences inexpliquées ; Travail devenu ingérable ; absentéisme croissant. Colère ou fort ressentiment. Signes de paranoïa. Signes d’anxiété chronique. Fatigue chronique intense. Idées suicidaires ; les discussions sur le suicide ou l’automutilation. Parler de faire du mal aux autres. |
Consommation problématique de drogues. Addictions et dépendances. Pensées intrusives ou ruminantes désagréables. Troubles de l’alimentation (boulimie, anorexie) Dépression ; perte de tout plaisir dans la vie. Tendances névrotiques. Psychose comme la schizophrénie Troubles de la personnalité. Tendance bipolaire (états maniaques à dépressifs). Actes de violence, verbaux ou non verbaux, physiques, domestiques, envers soi-même ou envers autrui. Incapacité de réfléchir ou de mieux comprendre leurs propres comportements. Blâmer ou humilier constamment les autres. Mensonge constant, malhonnêteté. Comportements sexuellement inappropriés ; insinuation sexuelle continue malgré les demandes d’interruption. |
Une nécessaire collaboration
L’un des défis des systèmes de santé est de mettre en place des stratégies de changement de comportements qui améliorent durablement la santé individuelle et collective tout en réduisant les dépenses de santé. Car rappelons que la grande majorité des problèmes de santé du monde actuels sont chroniques et résultent de modes de vie inappropriés. Au-delà des multiples actions à entreprendre pour répondre à ces défis, la question se pose de savoir quels sont les professionnels qui pourront au mieux assumer la responsabilité de facilitation des changements comportementaux des clients ? Les coachs de santé ou les psychothérapeutes ? Si les deux professions ont montré leurs efficacités sur des thèmes distincts, cela peut signifier que nous avons besoin des deux. La définition de leur champs respectifs d’interventions et de leurs objectifs communs de contribuer, chacun à sa manière, aux changements de comportements et de mode de vie exigés par la situation sanitaire actuelle, les coachs en santé et les psychothérapeutes doivent pourvoir établir une riche collaboration. On peut imaginer qu’une personne souffrant d’insuffisance coronarienne ait besoin d’un traitement médical, chirurgical et médicamenteux, d’un psychothérapeute pour l’aider à clarifier les sources d’un stress chronique, et d’un coach de santé pour l’aider à adopter un style de vie plus approprié à ses buts de santé comme à un projet de vie.
Meg Jordan et ses collaborateurs rappellent que si les coachs de santé possèdent des compétences bien spécifiques, ils doivent veiller à éviter d’empiéter sur la thérapie, à moins qu’ils ne soient spécifiquement formés à des compétences théoriques et pratiques en psychologie.
Sources
(1) Coaching vs psychothérapie en santé et bien-être: chevauchement, dissemblances et potentiel de collaboration ; Meg Jordan, John B. Livingstone ; https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3833547/
(2) Clinical Effectiveness of Lifestyle Health Coaching. Case Study of an Evidence-Based Program; Neil F. Gordon et al, Am J Lifestyle Med. 2017 Mar-Apr; 11(2): 153–166.
(3) L’évaluation des psychothérapies J.-N. Despland ; L’Encéphale, 2006 ; 32 : 1037-46, cahier 2 L’évaluation des psychothérapies ; file:///Users/jeanlucmonsempes/Downloads/main%20(4).pdf