Très utilisé en entreprise, cet ensemble d’outils issus de la PNL (Programmation Neuro-Linguistique) permet de décrypter les attitudes, d’éviter les blocages et de mener efficacement une négociation.
« La PNL me permet d’exercer mon rôle de manager avec davantage d’assurance », reconnaît Ophélie Richard, responsable de service dans un centre de radiologie. Au milieu des années 1970, quand elle a été inventée, la PNL (programmation neurolinguistique) n’avait pourtant pas vocation à s’appliquer dans l’entreprise. Ses pionniers américains, le linguiste John Grinder et le psychologue (ancien mathématicien et informaticien) Richard Bandler, ont cherché à comprendre les mécanismes en vigueur chez des thérapeutes renommés pour soigner leurs patients.
La modélisation des meilleures pratiques a donné naissance à la PNL, devenue l’un des outils de développement personnel et de management les plus utilisés en entreprise. Pourquoi ce terme barbare de « programmation neurolinguistique » ? « Programmation » désigne l’ensemble des apprentissages qui se sont changés en automatismes chez un individu. Certains sont indispensables, d’autres doivent évoluer car ils ne «collent» plus à la situation actuelle.
Ces apprentissages sont enregistrés dans notre cortex (neuro) et s’expriment par le biais du langage (linguistique). « Contrairement à d’autres outils psy, la PNL ne s’intéresse pas au pourquoi mais au comment. C’est ce qui fait sa force », souligne Patrick Amar, coach et dirigeant du cabinet Axis Mundi.
Cette méthode pragmatique propose des moyens concrets pour mieux communiquer et atteindre ses objectifs. Parmi la cinquantaine d’outils PNL développés ces trente dernières années, voici les sept qui sont le plus souvent utilisés en entreprise.
Se synchroniser pour pouvoir travailler ensemble
Rappelez-vous la façon dont le personnage de Sigourney Weaver s’intègre à la tribu des grands primates dans le film «Gorilles dans la brume». Elle singe les singes ! Nous autres humains fonctionnons de la même façon : c’est ce que la PNL nomme la «synchronisation». Mais cela ne va pas toujours de soi et réclame souvent un apprentissage. « Deux collègues avaient des problèmes à travailler ensemble, se souvient Aude Letenneur, formatrice du cabinet Le Dojo. L’un parlait très fort : pour lui, c’était un signe de bonne humeur. L’autre se montrait calme et posé : s’il haussait le ton, c’est qu’il était en colère.» Dans ce type de situation, la synchronisation permet à chacun de s’adapter l’un à l’autre.
La voix est notamment un excellent moyen d’y parvenir. Le coach Antoni Girod, auteur de « Découvrir la PNL » (InterEditions), apprend ainsi aux télévendeurs à caler leur débit et leur ton sur celui de leur interlocuteur : « Ils pourront ensuite aborder la discussion de manière respectueuse, sans que l’interlocuteur se sente agressé. » Appuyez-vous aussi sur les expressions et le vocabulaire. «Votre chef commence la réunion en affirmant qu’il va falloir se battre ? Demandez-lui comment le service peut remporter cette bataille », suggère Jean-Louis Muller, de la Cegos, coauteur de « La PNL avec les mots de tous les jours» (ESF Editeur). Ce mimétisme s’applique aussi aux gestes, à la posture ou à la tenue. Repérez également les «préférences sensorielles ». Si quelqu’un est dans le registre visuel « Je ne vois pas ce que tu veux dire » , faites-lui des schémas pour appuyer vos dires ! Dans tous les cas, déterminez les zones où les décalages sont les plus importants et essayez de les gommer.
Bâtir un métamodèle pour relativiser les faits
« Des plans comme ça, j’en ai vu défiler cinquante ! » Voilà comment le supérieur de Michel a accueilli sa proposition de réorganisation de la comptabilité. « J’avais le choix : soit je prenais la mouche, soit je cherchais à en savoir plus. » Après avoir interrogé calmement son patron sur les échecs passés, Michel a finalement pu faire passer son projet en douceur. Amener à préciser une pensée, approfondir une idée : tels sont les objectifs du « métamodèle », une technique qui part du principe que, entre ce que nous percevons et exprimons d’un fait et la réalité de ce fait, l’écart est souvent énorme.
Le coach Antoni Girod utilise notamment cette technique avec des sportifs de haut niveau. « J’ai eu cette discussion avec un champion de golf qui avait perdu une compétition : J’ai mal joué… Tu as mal joué pendant toute la partie ? Essentiellement sur les deux derniers trous Ton swing n’était pas efficace ? Non, c’étaient mes putts. En fait, j’ai bien joué sur le green au début, mais mal sur la fin. » Le joueur a ainsi pu relativiser son échec et trouver des pistes d’action : travailler son putt et sa concentration ! « Le métamodèle permet de ne pas rester sur des généralités, souvent nuisibles pour soi-même et pour les autres », conclut Antoni Girod.
Cadrer les objectifs pour être sûr d’obtenir des résultats
« Lorsque je suis en phase de prospection, avant de décrocher mon téléphone, je me fixe l’objectif suivant : passer une vingtaine d’appels en une heure et décrocher au moins deux rendez-vous », raconte Claude, commercial dans une entreprise de nettoyage industriel. En langage PNL, cette technique s’appelle le « cadrage d’objectifs ». Elle permet de définir une stratégie d’intervention et de mesurer l’écart entre l’état présent et l’état souhaité : c’est donc un excellent outil de motivation.
Le bon cadrage consiste à saucissonner le but à atteindre à partir d’une grille de questionnement précise : «Quel est le contexte ? (Je finis tous les soirs à 21 heures.) Quel est mon objectif ? (Terminer à 20 heures deux soirs dans la semaine.) En quoi est-ce important pour moi d’atteindre cet objectif ? (Je verrai davantage ma famille et je serai moins stressé.) Quelles sont les ressources dont je dispose pour l’atteindre ? (Un excellent bras droit, à qui je peux sous-traiter des dossiers.) Qu’est-ce qui pourrait m’empêcher de le réaliser ? (J’ai du mal à déléguer et je ne pourrai pas m’empêcher de repasser derrière lui pour vérifier.)» Ce genre de grille vous aidera à tracer le chemin pour parvenir à votre but et à bien identifier les obstacles (internes et externes) et les ressources
dont vous disposez.
Ophélie Richard, dans son centre de radiologie, utilise cette technique avec son équipe dans des cas aussi variés que l’apprentissage d’un logiciel ou la mise en place de nouvelles méthodes de travail : «Je veille à ce que l’objectif que nous avons fixé ensemble soit réalisable, formulé de façon positive et surtout écrit, afin que chacun puisse s’y référer.»
Trouver des points d’ancrage pour maîtriser ses émotions
Certains morceaux de musique vous donnent la pêche, tandis que d’autres vous plongent dans un état mélancolique ? Comme Proust et sa madeleine, ils sont probablement associés dans votre mémoire à des sensations agréables ou pénibles : il suffit que vous les entendiez pour que l’émotion soit automatiquement réactivée. Un phénomène que la PNL nomme «ancrage». Ainsi, pour ne pas vous laisser gagner par le stress lors d’une prise de parole, remémorez- vous un souvenir de réussite, cela dopera votre confiance.
Mieux : vous pouvez vous entraîner à ancrer dans votre mémoire ces souvenirs positifs, comme le fait l’entraîneur de tennis Fabrice Orru avec ses élèves. «Lorsqu’un coup est réussi, je demande au joueur de s’asseoir et de le visualiser intérieurement. A l’inverse, en cas d’échec, je lui indique le bon geste pour qu’il remplace l’image négative par une positive.» On peut créer soi-même des ancrages physiques, par exemple en se reculant et en se décontractant sur son siège en cas de contrariété. Vous associerez cette posture à un état distancié et à un détachement que vous pourrez retrouver lors d’un entretien stressant ou d’une négociation tendue.
«Un bon négociateur est capable de définir son point de vue, de comprendre celui du partenaire et d’avoir suffisamment de recul pour trouver des points de convergence», affirme Antoni Girod. Afin de parvenir à ce résultat, une méthode a les faveurs de la PNL : les «positions de perception», conçues pour préparer des négociations commerciales, mais aussi pour dénouer un conflit.
Varier les angles de perception pour concilier les points de vue
Comme un acteur, vous devez jouer la scène en vous mettant tour à tour dans la peau de chaque personnage. Partez de votre position et de vos propres objectifs puis, assis sur une autre chaise, exprimez ce que vous pensez être l’opinion de votre interlocuteur. Pour conclure, installez-vous à un autre endroit de la pièce, équidistant des deux précédents : vous êtes cette fois l’observateur qui dégage les éléments d’accord entre les deux parties.
«Cette théâtralisation est indispensable. J’ai réussi par ce moyen à démêler une situation avec une collaboratrice que je trouvais trop lente», se souvient Ophélie Richard. En se mettant à sa place (au sens propre), elle a compris que si cette salariée traitait ses dossiers à reculons, ce n’était pas par incompétence ou mauvaise volonté, mais simplement parce qu’elle manquait de confiance en elle-même. Cette personne avait besoin d’être rassurée davantage que les autres.
Donner du feedback pour créer un climat de confiance
Voici un moyen efficace d’augmenter votre estime de vous et de booster celle de vos collaborateurs : dans un contexte professionnel, il s’agit de donner son opinion sur le travail de quelqu’un dans le respect de la personne et de façon positive. Lors d’un entretien d’évaluation, par exemple, instaurez un climat de confiance avec votre interlocuteur en partant des points positifs. Demandez-lui notamment de vous citer ses plus belles réussites de l’année. Ne parlez qu’ensuite des « axes de progrès » (et non de problèmes ou de défauts). En outre, même si les améliorations concernent plusieurs aspects, restez concentré sur un ou deux domaines qui ont toutes les chances d’évoluer dans le bon sens grâce à une formation ou à un accompagnement par un coach.
Enfin, quoi que vous ayez pu dire au cours de l’entretien, concluez sur un élément positif en renouvelant votre confiance en votre collaborateur.
Utiliser l’échelle de Dilts pour convaincre ses interlocuteurs
En PNL, chaque événement peut être analysé à partir d’une grille, « l’échelle de Dilts », qui comprend plusieurs niveaux : celui de l’environnement (où ? quand ? avec qui ?), du comportement (quoi ?), des capacités (comment faire ?) et des valeurs (qu’est-ce qui est important ?). Une situation va solliciter un niveau plutôt qu’un autre selon les individus.
Lors d’une prise de fonctions, par exemple, vous pouvez vous servir de cette échelle pour construire votre discours de présentation en introduisant des éléments pertinents à chaque échelon, avec de bonnes chances de répondre ainsi aux questions du plus grand nombre : « Je prends aujourd’hui mes fonctions à la tête de ce département. Pendant cinq années, j’ai occupé tel poste dans telle entreprise (environnement). J’encadrais une équipe de 50 personnes.
Avec vous, j’ai tel objectif pour les mois à venir (comportement). Nous y arriverons d’autant mieux que je compte renforcer les forces de vente (capacité). Mais c’est surtout grâce à votre esprit d’équipe que nous pourrons relever ce défi (valeurs). » Tout type d’intervention peut être élaboré à partir de cette grille, cependant vous insisterez sur un aspect plutôt qu’un autre en fonction de vos interlocuteurs et de leurs attentes. C’est bien la force de la PNL : elle vous propose une panoplie d’outils efficaces qui vous permettent de vous adapter à chaque situation.
Un article de Marie Peronnau paru le 20/03/2008 sur le site de Capital ici